Sainte Euphrasie - Carmélite de Compiègne
Saintes Carmélites de Compiègne
Préambule
Le jour de leur martyr, le 17 juillet 1794, elles étaient seize carmélites venues de toute la France et de toutes les catégories sociales. Leur crime ? Elles furent condamnées « pour leur fanatisme et leurs sottes pratiques de religion ». Après avoir été expulsées de leur couvent et dispersées dans trois maisons de la ville de Compiègne, à l’initiative de leur prieure, Mère Thérèse de Saint Augustin, elles firent le vœu de s’offrir en holocauste « pour que la paix soit rendue à l’Église et à l’État ».
Les témoignages de leur comportement édifiant tout au long du procès et du trajet entre la Conciergerie et la place de la Nation sont bouleversants. Chacune de ces seize femmes avaient des faiblesses mais toutes au moment venu ont donné leur vie pour Dieu sans hésitation. Voici quelques lignes biographiques sur deux d’entre elles nées dans notre diocèse, l’une à Bourth et l’autre à Evreux.
Marie-Claude Cyprienne Brard
Sœur Euphrasie de l’Immaculée Conception
Celle que Marie Leczinska, qui aimait visiter le Carmel quand la cour était à Compiègne, appelait « sa toute aimable religieuse philosophe » avait 58 ans au moment de monter sur l’échafaud. Née à Bourth en 1736, elle est entrée au Carmel à 20 ans laissant derrière elle sa Normandie natale mais gardant sa trace dans le choix de son nom en religion « de l’Immaculée Conception », cette fête tellement suivie en Normandie qu’on l’appelait « la fête aux normands ».
Marie Leczinska n’était pas la seule à apprécier Sœur Euphrasie. Sœur Marie de l’Incarnation, une des trois rescapées du martyr, la décrivait comme « l’âme des récréations tant elle mettait de charme et d’agrément dans sa manière de converser ». Sûre et habitée de sa vocation comme en témoigne sa réponse en août 1790 aux membres du Directoire du District de Compiègne « Madame Brard (..) est dans la ferme résolution de conserver son habit, dût-elle acheter ce bonheur au prix de son sang », elle avait un caractère authentique, gai et spontané. Mais cette spontanéité pouvait lui jouer des tours et parmi ses lettres nous pouvons lire que l’abbé Rigaud lui conseille à deux reprises « d’être d’une grande attention sur vos propos » et de « veiller sur ses propos ».
Quand mère Marie-Thérèse de Saint Augustin, de seize ans sa cadette, fut élue Prieure, notre sœur Euphrasie eut du mal à l’admettre. Sa lutte contre cette difficulté qu’elle avait d’accepter les rôles secondaires au Carmel fut soulignée dans le procès de canonisation. Elle a lutté tout le long de sa vie au Carmel, mais enfin, quelques semaines avant son martyr, elle put écrire à Sœur Marie de l’Incarnation qu’elle était enfin en paix.
Depuis le tombereau qui les conduisait de la Conciergerie à la place de la Nation, Sœur Euphrasie a remarqué une jeune fille qui ne pouvait pas cacher son émotion devant ces seize religieuses en route pour l’échafaud en chantant la gloire de Dieu. Sœur Euphrasie lui passe son diurnal (livre de prière). Cette fille, tellement marquée par le don des Carmélites de leur vie jusqu’au bout pour Dieu, était Thérèse Binard. Plus tard, devenue grande, elle fonda le Couvent des Oiseaux à Paris. Son nom en religion était Mère Marie-Euphrasie.